L'été, apothéose du superficiel

Montpellier, ma ville, se transforme quand vient l'été. Evidemment les touristes sont là, le soleil brille, et il fait une chaleur qui vous cloue au sol, vous empêche presque de bouger. Mais je n'ai pas envie de me lancer dans des considérations climatiques, non, c'est plutôt de leurs conséquences dont je voudrais parler.

Les gens ne sont pas les mêmes en été. Leur état d'esprit change. Ils n'ont plus envie de s'exprimer, de penser. Ils ne parlent plus mais laissent leur corps le faire à leur place. Le culte de l'apparence atteint des sommets inégalés. Les filles sont belles, elles le montrent, les garçons sont beaux, ils le montrent. Défilé sans fin de mini-jupes, de tee-shirts moulants, de débardeurs, de shorts. Exposition gigantesque, jusqu'à l'overdose, de cuisses à la courbe parfaite, d'épaules musclées, de nombrils, de peau bronzée. Les gens mal foutus sont montrés du doigt, comme s'ils n'avaient pas le droit de venir perturber la fête. Les magazines féminins font décoller leurs ventes en proposant le dernier régime à la mode, ils ont compris que la raison ne fonctionne plus quand l'été approche. Ils font aussi décoller la frustration de celles qui s'aperçoivent qu'elles n'ont pas le corps de Claudia Crawford.

Dans les bars, les boites, sur la plage, on se regarde, on se jauge, on se compare. Inutile de parler, un regard suffit pour dire si tu me plais ou non. Sur les terrasses de la place Jean-Jaurès, le soir, ce cirque est assez amusant à voir d'un oeil d'ethnologue. C'est l'endroit où il faut être vu, où tous les jeunes de Montpellier viennent participer au grand jeu de la séduction et de la superficialité, un jeu dans lequel le corps est la star. On prend la pose, en espérant que la belle scandinave ou le bel italien de la table d'à côté va remarquer notre peau bronzée et nos cheveux gominés. Ce qu'il/elle va dire, on s'en fout. Son corps nous attire, et c'est le plus important.

La profondeur, la réflexion, les sentiments n'ont plus leur place en été. C'est la période pendant laquelle on ne pense pas. On oublie nos problêmes, tout va bien, faut pas se prendre la tête. Surtout ne pas réfléchir à ce que l'on fait, ne pas penser aux conséquences, on est là pour s'amuser.

C'est quand même amusant à voir, une ville dont les habitants ont déconnecté leur cervelle et ne fonctionnent plus que par leurs instincts animaux. Si vous avez quelques jours libres, venez voir le spectacle, ça vaut le coup d'oeil.





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